Insertion : Le Département en lutte contre la précarité alimentaire

La lutte contre la précarité alimentaire, c'est un peu David contre Goliath. Une bataille dans laquelle s’est lancé le Département depuis des années : Soliagri, projet alimentaire territorial, pacte local des solidarités… Aujourd'hui est venu le temps de structurer encore davantage la rébellion contre celle qui touche bien plus de Haut-Alpins qu'imaginé.

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©IStock

Quand l’ennemie se tapit dans les foyers les plus précaires, qu’elle frappe en toute discrétion, pas facile de lutter. Pourtant, dans les Hautes-Alpes, on sait qu’elle existe. Aucune statistique officielle n’en fait état. Mais les témoignages des associations caritatives « habilitées à faire de la distribution »* suffisent à comprendre que la précarité alimentaire s’est bel et bien invitée dans nos montagnes. Chez des jeunes, des retraités, des familles monoparentales, des travailleurs pauvres, des personnes vivant des minimas sociaux, d’autres en situation de handicap, des accidentés de la vie (divorce, perte d’emploi, etc.)…

Une multiplicité de profils pour une certitude : « La précarité alimentaire a augmenté depuis le Covid (inflation, hausse des charges liées au logement…) », note-t-on généralement dans le département. Un constat qui ne se base que sur celles et ceux qui osent frapper à la porte des points de distribution alimentaire. Mais combien de Haut-Alpins concernés, paralysés par la honte, passent sous les radars ?
Si l’ampleur des dégâts reste floue, les besoins sont là. Et le Département, en sa qualité de chef de file de l’action sociale, en est parfaitement conscient. Raison pour laquelle depuis de nombreuses années il a fait sienne la lutte contre ce fléau. En multipliant les dispositifs, à l’image de Soliagri, né en 2020, en pleine pandémie du siècle. Le principe ? Débloquer une enveloppe annuelle de 100 000 € à disposition des associations habilitées. Une somme qui leur sert à acheter les denrées dont elles ont besoin auprès de producteurs locaux, par l’entremise de l’Agence de développement économique et touristique de Département (Addet). Une démarche gagnant-gagnant très vite intégrée au Projet alimentaire territorial du Département (PAT). Un label étatique obtenu en 2021 dont la collectivité a confié le pilotage à l’Agence.

La nécessité d’un diagnostic précis

À cela s’ajoute le Pacte local des solidarités conclu avec L’État qui a, notamment, permis le financement d’un demi-poste au sein de l’Union départementale de l’économie sociale et solidaire des Hautes-Alpes (allié majeur chargé de structurer et d’animer les réseaux associatifs, de coordonner les acteurs… ). Et faute de banque alimentaire dans nos montagnes, le pacte a également ouvert le chemin vers une solution, main dans la main avec Échange paysans. Ce dernier pourrait ainsi faciliter le transport de nourriture depuis la banque des Alpes-de-Haute-Provence jusqu’aux points de distribution haut-alpins.

Le Département a, par ailleurs, récemment franchi un nouveau cap le conduisant au niveau 2 du PAT. Un projet inscrivant désormais dans son ADN cette lutte contre la précarité alimentaire.
Une condition a toutefois été posée : initier un diagnostic précis. Deux bureaux d’études sont actuellement sur le coup. Et déjà, les fruits d’un travail entamé en octobre dernier commencent à mûrir. De quoi brosser un premier tableau qui vient corroborer les réalités vécues sur le terrain : demande en hausse, hétérogénéité des personnes touchées. Avec des spécificités territoriales qui accentuent ce phénomène de précarité alimentaire : saisonnalité touristique et migration pour le nord du département ; loyers et charges élevées au centre ; difficultés liées à l’emploi, la mobilité et la saisonnalité touristique au sud. En ressort également l’impératif de mieux articuler et rendre plus lisibles les aides et actions portées par le Département et l’État. Un point qu’ont tenu à faire remonter les associations caritatives, principaux relais sur le territoire qui travaillent en synergie avec les travailleurs sociaux (notamment du Département).

Loin de rester lettre morte, ce diagnostic – qui sera présenté le 12 juin lors des rencontres solidaires qu’organisera la collectivité à la Cinémathèque de montagne, à Gap – a déjà mis en lumière des pistes de travail : créer un observatoire départemental afin de mieux piloter la stratégie de lutte contre la précarité alimentaire, entre tous les acteurs ; pallier le manque de bras dont pâtissent les structures de distribution alimentaire ; former les bénévoles histoire de mieux les armer pour aider ceux qui viennent leur demander un coup de pouce. « L’idée est qu’ils sachent vers quels professionnels et/ou travailleurs sociaux les orienter, en fonction des problématiques décelées », explique Virginie Peyron en charge du dossier pour tout ce qui relève du volet … social. Des pistes qu’il ne reste plus qu’à explorer avant d’en défricher de nouvelles pour que chaque Haut-Alpin ait accès à une alimentation digne de ce nom.


*Dans les Hautes-Alpes, sont habilitées par les services de l’État à distribuer des denrées : le Chemin solidaire, le CCAS de Gap, Coallia/la Cordée, la Croix rouge, la Main de partage, les Restos du cœur, Saint-Vincent de Paul, le Secours catholique et le Secours populaire.