Zoom sur... les conseillères en économie sociale et familiale
Hasard ou pas, dans le département, le conseil en économie sociale et familiale se conjugue au féminin. Sur le territoire, elles sont huit à venir en aide aux Haut-Alpins qui ne parviennent plus à gérer normalement leur budget.


Les conseillères en économie sociale et familiale (CESF) n'ont rien à voir avec l'image que beaucoup leur prêtent : un agent de l'administration froid, adepte de la calculatrice, qui n'aurait d'autre cesse que de chasser les coûts superfétatoires. Au contraire, maniant avec finesse l'art de la diplomatie et de l'écoute, c’est en toute bienveillance qu'elles apportent leur soutien aux Haut-Alpins qui ne parviennent plus à gérer leurs dépenses avec tempérance et mesure, au point de pousser certains d'entre eux au bord du précipice (surendettement chronique, menace d'expulsion).
Mais là aussi, haro sur les idées reçues. Maman célibataire très éloignée de l'emploi, salarié aux revenus corrects, ancien directeur de banque à la retraite et à la mémoire défaillante : perdre le contrôle sur le budget de son foyer peut toucher toutes les catégories sociales. Il n'empêche que oui, les personnes qui bénéficient des conseils d'une CESF sont, au préalable, passées entre les mains d'un travailleur social, du Département ou d'une structure extérieure. C'est d'ailleurs par leur biais qu’entrent en action les CESF, si un dysfonctionnement budgétaire est repéré.
Une tendance se dessine toutefois. « L'endettement passif », étranglant les personnes dont « les ressources ne permettent pas de payer les dépenses courantes : loyer, électricité, eau, alimentation… prend de plus en plus de place », constate Élodie Casuccio qui œuvre dans le Queyras, où, comme dans nombre de territoires ruraux, les services de proximité (notamment de l'État) ont déserté les lieux.
Si aucune histoire ne se ressemble, tout commence toujours de la même manière : un bilan, soit à domicile (pour pallier les problèmes de mobilité assez fréquents), soit dans les bureaux des CESF attachées aux Maison des solidarités (MDS). Retraçant le moindre de nos faits et gestes, l'outil numéro un pour savoir ce qui ne tourne pas rond dans un budget en mode « alerte rouge » reste le relevé de compte. « À l'image d'une prise de sang, son analyse nous permet de détecter ce qui ne fonctionne pas », explique Élodie.
Mais voilà, le « décortiquer », c'est « entrer dans l'intimité des gens », pas toujours prompts à l'étaler devant une étrangère. Instaurer une « relation de confiance », avec finesse, psychologie et sollicitude, s'avère ici indispensable. « Nous ne sommes pas là pour juger les gens ou les prendre à défaut. Mais pour les accompagner, les aider à réaliser de quelle manière leurs dépenses impactent leur quotidien », confient d'une voix les CESF rencontrées.
« Faire parler les chiffres »
« Faire parler les chiffres » en toute neutralité a, ainsi, été pareil à électrochoc pour ce jeune couple qui dépensait, sans en avoir conscience, plus que de raison en jeux de hasard et produits de beauté. Ou encore pour cette vielle dame qui cumulait 15 contrats de mutuelle tous identiques. Sans oublier cette maman qui voulait gâter sa famille pour Noël en achetant plus de 500 € de cadeaux sur un revenu de 650.
Après le constat, vient le temps des objectifs à atteindre, parfois simples et anodins aux yeux du quidam et pourtant essentiels. « Nous sommes à leurs côtés pour les fixer, mais il faut vraiment qu'ils en soient à l’origine. C'est une manière pour eux de reprendre progressivement la main sur leur vie », poursuit Régine Garnier, de la MDS Gap-Cézanne.
Si l'action des CESF ne suffit pas, elles passeront la main à la cellule vulnérabilité du Département qui, avec leur concours, pourra mettre en place une aide plus conséquente. Mais œuvrer au retour à l'équilibre budgétaire n'est pas leur seule mission. Trier des papiers délaissés dans un coin, remplir des dossiers de surendettement, fait aussi partie de leur quotidien. Sans parler des actions collectives qu'elles mettent en place : animations d'ateliers pour fabriquer des produits ménagers maison, réalisation d'un livre de recettes de cuisine à moindre coût…
À cela s'ajoute une mission de plus en plus prépondérante : l'évaluation des informations préoccupantes (IP). Réalisées en binôme avec un travailleur social, une puéricultrice, etc., les IP renvoient à des situations complexes de potentielle mise en danger de l'enfant. Pas toujours simple à gérer, d'autant plus en termes de responsabilité : un rapport d'évaluation pouvant aboutir à un signalement judiciaire, si le danger est avéré.